Retour sur la sanction de l’article 2293 du Code civil : Le défaut d’information annuelle de la caution, prévue à l’article 2293 du code civil, est sanctionné par la déchéance de tous les accessoires de la dette, frais et pénalités.

Cassation, 1ere chambre civile, 10 octobre 2019, n°18-19.211

Malgré l’absence de caractère synallagmatique du contrat de cautionnement, nombreuses sont les obligations d’information pesant sur le créancier.

Parmi elles, se trouve celle de l’article 2293 du Code civil qui oblige le créancier à informer la caution personne physique s’engageant de manière indéfinie de l’évolution du montant de la créance garantie et de ses accessoires au moins annuellement à la date convenue entre les parties ou, à défaut, à la date anniversaire du contrat, sous peine de déchéance de tous les accessoires de la dette, frais et pénalités.

Dans un arrêt du 10 octobre 2019, la première chambre civile de la Cour de cassation fit application de ce texte.

En l’espèce, par acte authentique des 2 et 9 juillet 1990, une banque consentait à une société un prêt d’un montant de 795.000 francs, soit 121.197 euros avec intérêts conventionnels au taux de 12 % l’an, remboursable en quinze années, dont Madame D s’est portée solidaire.

Suite à des impayés, la banque s’est prévalue de la déchéance du terme et a fait inscrire, le 5 juin 2015, une hypothèque judiciaire provisoire sur un bien immobilier appartenant à la caution.

Cette dernière a assigné la banque en mainlevée de la sûreté et, soutenant qu’en l’absence de son information annuelle s’agissant du montant de la créance, a sollicité la déchéance de tous les accessoires, intérêts, frais et pénalités.

Condamnée par la Cour d’appel de Basse-Terre en 2018 à recalculer le montant de sa créance excluant les frais et accessoires à l’exception de l’intérêt légal dû à compter de la mise en demeure de la caution, la banque se pourvoyait en cassation.

La Cour de cassation confirmait la décision de la Cour d’appel dans toutes ses dispositions :

« Mais attendu, en premier lieu, que le défaut d’information annuelle de la caution, prévue à l’article 2293 du code civil, étant sanctionné par la déchéance de tous les accessoires de la dette, frais et pénalités, la cour d’appel, qui a relevé que la banque ne pouvait justifier du respect de cette obligation, n’était pas tenue de procéder à la recherche prétendument omise ;

Et attendu, en second lieu, qu’ayant fixé toutes les modalités de calcul de la somme mise à la charge de la caution, elle n’a pas méconnu son office en n’effectuant pas le calcul nécessaire à la détermination du montant de la condamnation ».

La solution est bienvenue et une application parfaite de l’article 2293 du Code civil. Cette sanction pourtant stricte, fait cependant l’objet de peu de contentieux tant les établissements bancaires ont pris, avec les réformes successives, pleine mesure de leurs obligations conséquentes.

Pourtant, comme le montre cet arrêt récent, les manquements perdurent.

L’arrêt d’espèce est une illustration des obligations grandissantes des établissements bancaires  et plus généralement des créanciers professionnels consacrées dans de plus en plus de textes.

C’est notamment le cas de l’article L. 343-6 du Code de la consommation qui sanctionne le non-respect de l’obligation d’information pesant sur le créancier professionnel à l’égard de la caution personne physique par la déchéance des pénalités ou intérêts de retard échus depuis la précédente information jusqu’à la date de communication de la nouvelle information.

Aussi, l’article L. 313-22 du Code monétaire et financier prévoit que les établissements de crédit et société de financement ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, que le manquement à l’obligation d’information relative au montant de la dette « emporte, dans les rapports entre la caution et l’établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu’à la date de communication de la nouvelle information ».

Si la sanction est, dans ces articles, limitée par rapport à l’article 2293 du Code civil, nul doute que le législateur est voué à être toujours plus exigeant à l’égard des obligations de vigilance et de diligence des établissements bancaires…

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