Vente de meubles et pratiques commerciales trompeuses : relaxe totale pour un salarié défendu par le cabinet
- Julien Plouton - Avocat à la Cour

- il y a 6 jours
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Les affaires de "magasins éphémères" de meubles, attirant les consommateurs par des cadeaux pour mieux leur vendre des canapés à crédit, font régulièrement la une de la presse. Mais lorsque la justice pénale s'en saisit, elle a parfois tendance à vouloir condamner tout le monde : dirigeants, gérants de paille, mais aussi simples vendeurs. Le 4 novembre dernier, le Cabinet Julien Plouton a obtenu une victoire significative en faisant relaxer un commercial accusé, à tort, d'escroquerie et de pratiques commerciales trompeuses.
Le contexte : Le piège des "magasins éphémères"
Le dossier concernait un système de vente bien connu de la répression des fraudes. Une société de vente de canapés opérait via des magasins éphémères, loués pour de courtes durées. Le mode opératoire était rodé :
Le harponnage : Des clients étaient démarchés par téléphone (via des centres d'appels) pour venir retirer un "cadeau" en magasin.
La mise en scène : Une fois sur place, les prix affichés étaient artificiellement gonflés.
La fausse remise : Un parcours commercial théâtralisé permettait de faire croire au client qu'il bénéficiait d'une remise exceptionnelle, l'incitant à signer un achat impulsif, souvent à crédit.
Le Parquet poursuivait plusieurs personnes, des dirigeants aux vendeurs, pour escroquerie en bande organisée et pratiques commerciales trompeuses. Notre client, Monsieur L., salarié d'une des entreprises impliquées et ancien gérant de paille, se retrouvait sur le banc des prévenus, risquant une condamnation pénale lourde et une inscription à son casier judiciaire.
L'accusation : Le salarié complice du système ?
L'accusation reposait sur l'idée que tous les acteurs de l'entreprise participaient sciemment à une "œuvre commune" frauduleuse. Le Ministère Public reprochait notamment à notre client :
D'avoir participé à des ventes utilisant des prix illusoires et des rabais factices.
D'avoir contourné le délai de rétractation de 7 jours en livrant les meubles le jour même (ce qui est illégal en cas de démarchage).
D'avoir joué un rôle actif de "finisseur" (celui qui conclut la vente par une fausse remise).
La stratégie de défense : Distinguer le "Piqueur" du "Finisseur"
Pour obtenir la relaxe, le Cabinet Julien Plouton a dû déconstruire la mécanique de l'accusation en revenant aux faits précis et au rôle exact de chaque intervenant.
1. L'absence de participation matérielle aux faits visés
L'ordonnance de renvoi listait des ventes précises estimées frauduleuses. Or, une analyse minutieuse des bons de commande et une expertise graphologique ont permis de démontrer que notre client n'avait signé aucun des contrats litigieux. Il n'était pas le vendeur en charge de ces clients spécifiques. Comme nous l'avons plaidé : "On ne peut condamner un prévenu pour des faits auxquels il n'a pas participé matériellement."
2. "Piqueur" vs "Finisseur" : Une hiérarchie déterminante
Dans ces systèmes de vente, les rôles sont cloisonnés :
Le "Piqueur" : Il accueille le client, remet le cadeau et présente les produits. C'était le rôle de notre client.
Le "Finisseur" : C'est souvent le responsable du magasin ou un cadre. Il intervient à la fin pour "négocier" le prix, accorder la fausse remise exceptionnelle et valider le crédit.
Nous avons démontré que notre client, simple "piqueur", n'avait aucun pouvoir sur la fixation des prix ou les remises accordées. Il ne faisait qu'appliquer les directives de sa direction sans maîtrise du processus décisionnel final.
3. L'absence d'élément intentionnel
En droit pénal, il ne suffit pas de constater une infraction, il faut prouver l'intention coupable. Nous avons soutenu que notre client, salarié subordonné, appliquait les méthodes de vente enseignées par son employeur sans nécessairement avoir conscience de l'ampleur de la fraude orchestrée par les dirigeants (montages de sociétés, blanchiment, etc.). Il obéissait aux ordres, sans latitude d'action.
La décision du Tribunal : Relaxe totale
Le Tribunal Correctionnel a suivi notre argumentation. Dans sa décision du 4 novembre, il a prononcé la relaxe de Monsieur L. pour l'ensemble des chefs de prévention (escroquerie et pratiques commerciales trompeuses).
Les juges ont reconnu que la preuve de sa participation personnelle aux ventes frauduleuses n'était pas rapportée et que sa qualité de simple salarié exécutant ne suffisait pas à caractériser l'intention délictueuse nécessaire à une condamnation.
Ce qu'il faut retenir
Cette affaire rappelle plusieurs principes essentiels en matière de droit pénal des affaires et de défense des salariés :
La responsabilité pénale est personnelle : On ne peut pas condamner un salarié "par contamination" simplement parce que son employeur a mis en place un système frauduleux. Il faut prouver sa participation active et consciente.
L'importance de l'analyse des pièces : C'est l'examen détaille des bons de commande (signatures, écritures) qui a permis de disculper notre client.
Le statut de salarié protège (parfois) : Le lien de subordination peut, dans certains cas, faire obstacle à la caractérisation de l'élément intentionnel, transformant le complice présumé en simple exécutant.
Vous êtes mis en cause dans le cadre de votre activité professionnelle ? Le Cabinet Julien Plouton assure votre défense pénale pour faire valoir vos droits et contester les accusations infondées.



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